Le médecin, journaliste et philanthrope
Théophraste Renaudot est né à Loudun en 1586 dans une famille protestante, d’un père originaire du Maine, récemment installé dans la ville comme précepteur de la jeunesse, et d’une mère loudunaise. Cette ascendance maternelle facilite une intégration rapide dans la bourgeoisie locale.
A 16 ans, il part étudier la chirurgie à Paris, probablement au collège Saint-Côme qui accueille sans difficulté les enfants protestants. Il y passe deux années pendant lesquelles il contracte les écrouelles, une maladie de peau d’origine tuberculeuse qui le défigure.
Le médecin philanthrope
On suppose qu’il poursuit son parcours universitaire à la faculté de médecine de Poitiers : dans son discours de 1619, il rappelle qu’on doit son médicament préféré, le polychreston « à l’industrie soigneuse & docte expérience des Médecins de Poictiers ».
En novembre 1605, il rejoint la faculté de Montpellier. C’est un élève brillant : il obtient son doctorat en à peine 8 mois. Son jeune âge étant à ses yeux un handicap pour exercer la médecine, il décide de voyager « dedans et dehors le royaume », pour acquérir de l’expérience.
En 1608, on retrouve sa trace à Loudun où il se marie. C’est à cette époque qu’il a pu croiser François Leclerc du Tremblay, plus connu sous le nom de père Joseph. Par l’intermédiaire du moine, il est vraisemblablement présenté à Richelieu qui le fera bénéficier de sa protection.
Le 14 octobre 1612, il reçoit de Louis XIII le titre de médecin ordinaire du roi, qui lui permet d’exercer sur toute l’étendue du royaume, et la charge de « s’employer au règlement général des pauvres du royaume». Le 3 février 1618, il devient commissaire général des pauvres, et en 1626, après s’être installé à Paris, il présente au roi son Traité des Pauvres.
Sa conversion au catholicisme, en octobre 1628, va désormais faciliter sa carrière.
Les activités du bureau d’adresses
Après son installation dans l’île de la Cité en 1629, il ouvre un premier bureau d’adresses et de rencontres. L’objectif est de permettre aux gens qui cherchent du travail de consulter des annonces d’emploi et de rencontrer plus facilement ceux qui les proposent.
La Gazette
Le 30 mai 1631 paraît un petit folio de 4 pages in-4° intitulé Gazette. La composition est compacte, avec des marges étroites sur lesquelles figurent, en italique, les dates et les lieux des événements. Elle offre au lecteur des nouvelles provenant de l’étranger. C’est seulement à partir du numéro 6 que l’on découvre des informations relatives à la France.
On considère que la presse périodique française est née avec cette Gazette, dont le rythme de parution est hebdomadaire. Renaudot y met sa plume au service du pouvoir. Il jouit de la protection royale et le 11 octobre 1631, il obtient confirmation du privilège de la Gazette.
En 1637, Renaudot présente sa quatrième « innocente invention » : les ventes à grâce de rachat et pures et simples. Il ne fait cependant que franciser un dispositif italien : le monte di pietà, existant depuis le XVe siècle.
En 1640, il met en place Les consultations charitables pour les pauvres malades, gratuites pour les plus miséreux mais payantes pour les autres.
La chute
Avec les décès de Richelieu le 4 décembre 1642 et Louis XIII le 14 mai 1643, il perd coup sur coup ses deux protecteurs : la chute n’en sera que plus rapide. L’année suivante, Renaudot et les médecins de Montpellier ont interdiction d’exercer à Paris.
S’il y a cependant un privilège qu’il conserve, c’est celui de son journal, si utile au pouvoir, dont il obtient confirmation en mars 1644.
Il aura encore quelques satisfactions : le 6 mai 1646 il est nommé historiographe du roi et logé dans la Grande Galerie du Louvre à partir du 15 mars 1648. Il y vivra jusqu’à son décès, le 25 octobre 1653.
Les inventions de cet homme d’exception que fut Théophraste Renaudot ont largement impacté la vie quotidienne du royaume.
Hebdomadaire puis quotidienne, La Gazette, qui reste dans la famille de Renaudot jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, sera tirée jusqu’en 1915 ; les monts-de-piété perdurent, transformés en caisses du crédit municipal par décret en 1918 ; enfin le bureau d’adresses peut aujourd’hui être considéré comme la première ébauche de Pôle Emploi.
Pour se plonger dans l’univers de ce grand homme, il faut se rendre au Musée Renaudot, à la maison natale de Théophraste Renaudot, rue du jeu de Paume à Loudun.